picture Un livreur Uber Eats seul dans la rue...

Une étude de Food Service Vision permet de se faire une idée plus précise de l’impact abyssal de la crise du coronavirus sur le secteur de la consommation hors domicile. Le spécialiste y délivre également des conseils pour anticiper le redémarrage de l'activité dans les meilleures conditions possibles.

Après une année 2019 globalement positive, le secteur du Food Service est aujourd’hui touché de plein fouet par les conséquences de la crise du coronavirus. Et la situation n’a pas attendu le démarrage officiel du confinement pour se dégrader à grande échelle, comme le rappelle à juste titre le cabinet d’études Food Service Vision, qui vient de publier le premier volet d’une étude inédite sur le sujet(*). Dès le mois de janvier, les groupes internationaux, industriels et les grandes chaînes de restauration ont perçu les premiers signes d’un ralentissement, notamment avec la suspension des voyages des touristes chinois en France. La situation n’a eu dès lors de cesse de se dégrader pour ensuite entamer une profonde phase de déclin à compter de fin février. Les premiers transferts d’achats signi­ficatifs des achats de la restauration vers la GMS se sont fait ressentir sur la première quinzaine de mars, « pour aboutir à la situation qu’on connaît depuis le confinement, à savoir un arrêt quasi-total de l’activité en hors domicile et la disparition des débouchés des fournisseurs de la restauration », résume François Blouin, CEO fondateur de Food Service Vision. Entre janvier et fin mars 2020, la restaura­tion a ainsi vu son chiffre d’affaires s’effondrer : -1 % en janvier, -4 % en février, -15 % entre le 1er et 15 mars, -74 % entre le 15 et le 30 mars. « Au total, le bilan du premier trimestre s’éta­blit à -16 % », souligne le spécialiste du Food Service.

Situation contrastée par secteurs

Depuis le début du confinement, la baisse d’activité est certes inégale selon les secteurs de la restauration :  -30 à 50 % pour les commerces de proximité ; -70 à 85 % pour la restauration rapide et l’hôtellerie ; -90 à 100 % pour la res­tauration à table, scolaire et d’entreprise. quasi-stabilité en revanche pour certains secteurs particuliers de la restaura­tion collective (établissements sanitaires et sociaux, les armées et les prisons, sécurité civile et forces de l'ordre). De son côté, le secteur de la boulangerie-pâtisserie résiste sur son offre de pain, mais enregistre tout de même une perte de chiffre d’affaires d’environ 50 % à fin mars. Le cabinet de conseil observe également qu’une partie de la restauration rapide ré­siste, portée par la vente à emporter, le "click and collect " et la livraison. « Plus généralement, la livraison, aujourd’hui seul canal encore actif dans la restauration commerciale, fait preuve d’une résistance toute relative », commente notre interlocuteur.

Un manque à gagner astronomique

Côté chiffre d’affaires, Food Service Vision estime le manque à gagner à déjà plus de 3,5 milliards d’Euros pour le marché de la restauration dans son ensemble (et plus de 1,1 milliard perdu pour ses fournisseurs). « En d’autres termes, ce sont près de 160 millions de repas hors domicile qui partent en fumée chaque semaine, 430 depuis le début du confinement donc », souligne le CEO.

FSV-covid.jpg

Source : Food Service Vision


Les scenarii possibles à court et moyen termes

Mais si l’étude, qui sera réactualisée dans les prochains mois, apporte un éclairage sur les enjeux et consé­quences de cette crise pour le secteur du Food service, elle propose également des scenarii à court et moyen termes. « L’objectif étant de permettre aux décideurs d’éclairer leurs prises de décisions, en leur proposant des pistes d’actions pour anticiper le redémarrage de l’activité dans les meilleures conditions possibles », explique Emmanuel Argoud, directeur associé chez Food Service Vision. Certes les décisions politiques de déconfinement et la confiance des consommateurs vont conditionner cette reprise, mais le cabinet de conseil évoque 5 phases successives à anticiper tant que possible :

Étape 1 : retour de certains actifs pour le déjeuner et reprise contrôlée des déplacements professionnels ;

Étape 2 : retour des écoles, collèges, lycées ; Sorties loisirs en petit groupe ;

Étape 3 : réouverture d’espaces de restauration sécurisés ;

Étape 4 : reprise progressive des voyages professionnels/loisirs ;

Étape 5 : réouverture de la restauration en grands groupes.

 Sans oublier enfin les enjeux qui vont s’affirmer ou voir le jour, en matière de proximité, d’hygiène ou de prix, dans un contexte de consommation post-coronavirus. « En toute logique, il faut s’attendre à un intérêt croissant pour l’offre en circuit court, mais répondant à des normes d’hygiène plus stricts. De même, à la lumière du rapport " sans contact ", le service devra probablement se réinventer en profondeur. Enfin, en écho à une potentielle baisse du pouvoir d’achat dans les mois à venir, une nouvelle équation sera également à résoudre sur le créneau du rapport qualité/prix des prestations », conclut Emmanuel Argoud.

 

(*) : Food service & covid-19 - Revue stratégique #1 - Avril 2020 : étude réalisée sur la base de plus de 30 interviews réalisées en mars-avril 2020 avec des décideurs (chaînes de restauration, agrégateurs, restaurants virtuels, distributeurs, grossistes, fournisseurs agroalimentaires et boissons…), des leaders d’opi­nion, des experts et des syndicalistes de la restauration.