Très connu des consommateurs, le Label Rouge creuse son sillon avec, pourtant, de grosses disparités selon les catégories de produits. Pour s’adapter aux attentes des consommateurs, le cap est mis vers les produits plus élaborés.

Créé en 1965, à l’initiative d’un groupement d’aviculteurs landais défenseurs d’un mode d’élevage plus vertueux que la batterie pour leurs poulets, le Label Rouge est depuis sorti de sa cage pour s’inviter sur bon nombre de marchés. Il n’y a qu’à ouvrir l’œil en parcourant les allées d’une grande surface pour s’en rendre compte : Viande de bœuf, poulet, jambon cuit ou sec, emmental, ravioles, ail rose, etc. Aussi différents soient-ils, tous ces produits ont un point commun : leur niveau de qualité supérieure !

Sous la houlette de l’INAO depuis 2006, le Label Rouge est un signe officiel de qualité qui garantit la qualité supérieure. Laquelle englobe les caractéristiques sensorielles, bien entendu mais aussi les conditions de production, la composition, etc. Il existe ainsi désormais plus de 400 cahiers des charges homologués dans toutes les filières.

Une excellente notoriété

Véritable référence au rayon volaille (le poulet Label Rouge) s’est véritablement imposé comme le standard du marché ! La place de ce signe de qualité est cependant très variable d’un marché à l’autre. Pourtant, les consommateurs connaissent le Label Rouge et lui font confiance. Selon le cabinet Quantitude dans une enquête réalisée pour LSA, le Label Rouge jouit d’un taux de notoriété de 92 %, loin devant l’AOC et ses 84 %. Dans la dernière étude de Kantar, « La jungle des labels », c’est même LE label affichant la plus grande notoriété, avec 97 % des Français qui disent le connaître. « Ce label est historique et a toujours inspiré la confiance avec une belle constance depuis des années. Ce score de notoriété est un beau reflet d’un travail long terme sur un label », explique Florent Chatir chez Kantar. Mais au-delà de cette notoriété exceptionnelle, le Label Rouge rassure aussi les consommateurs. Un sondage réalisé par l’INC pour le Conseil de l’Alimentation sur la connaissance des signes de qualité montre le Label Rouge est une source de réassurance et une aide dans l’acte d’achat pour 83 % des personnes interrogées. « C’est bien la preuve, et nous en sommes très fiers, que le Label Rouge est réellement associé à une dimension de qualité dans l’esprit des consommateurs », s’enthousiasme Frédéric Grosso, responsable du Pôle Label Rouge à l’INAO.

Produits élaborés : le prochain défi à relever

Pour l’heure, les produits labellisés restent, pour l’essentiel d’entre eux, des produits bruts ou peu transformés (viandes, volailles entières ou en découpes, charcuteries) mais les recettes élaborées demeurent rares. Une lacune qui pourrait tendre à se combler dans le temps avec la multiplication de plats cuisinés sous label, notamment au rayon surgelé. Outre la pizza au feu de bois, qui existe de longue date, il y a aussi les escargots, les ravioles, et depuis cette année, deux nouvelles recettes piliers du plat cuisiné à base de viande hachée, le hachis Parmentier et encore tout récemment les lasagnes bolognaises. « Ce sont pour nous des lancements qui ont beaucoup de sens à plusieurs titres. Outre l’emploi de viande Label Rouge, ce qui soutient une autre filière, il n’y a pas d’additif et nous avons sélectionné des ingrédients qualitatifs et en quantité suffisante pour assurer la qualité supérieure sur le plan gustatif », détaille Frédéric Grosso. Autre point, pas des moins importants : le cahier des charges prévoit des conditionnements adaptés aux besoins de la restauration collective.

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En photo, un étui de crevettes de Madagascar, arborant le signe de qualité qui attire forcément l'oeil du consommateur.

Du potentiel en restauration

La restauration représente un potentiel de croissance important pour les filières labellisées. Et le surgelé a lui aussi une certaine carte à jouer. « En 2020, 17 % des promotions dans les catalogues des grossistes en lien avec le Label Rouge concernaient des produits surgelés, toutes cibles confondues. En tête de liste, on retrouve les produits de viandes et volailles, qui représentent près de la moitié des insertions », explique Laure Gosselin, directrice associée chez Food Service Vision, Côté intervenants, Passion Froid et Krill sont leaders en promotions sur le label rouge surgelé, tandis que le groupe Sysco a sensiblement élargi sa gamme en 2020. Mais bien que surreprésenté dans les catalogues de fêtes, le Label Rouge occupe encore une place anecdotique en restauration (avec à peine 0,5 % de part dans les insertions promotionnelles des catalogues, soit loin derrière le bio, l’origine France ou les AOP et AOC). Pour autant, il s’inscrit dans la liste des signes de qualité éligibles pour permettre aux professionnels la restauration collective d’atteindre l’objectif de 50 % de produits sous signes de qualité (dont 20 % de bio) réglementaire. Bien plus accessible que le bio pour certaines catégories de produits, dont la viande et la volaille, le Label Rouge présente des atouts indéniables qu’il s’agit maintenant de faire connaître aux professionnels. Même si La tendance actuellement baissière des tarifs en lien avec les appels d’offres sur les marchés de restauration, est un frein manifeste au développement du Label Rouge en restauration collective.

Le critère du prix

Côté restauration commerciale, on sent un réel potentiel en devenir (plus de la moitié des promotions Label Rouge sont concentrées sur des catalogues dédiés à ce marché). « En mettant plus systématiquement en avant les produits labellisés qu’ils utilisent, les restaurateurs pourraient surfer sur la notoriété de ce signe de qualité et ainsi valoriser leur carte », explique la directrice associée chez FSV. Même si le prix plus élevé des produits est bien entendu à prendre en compte dans l’équation. Dans ce sens, l’analyste nous indique que les produits ou recettes porteuses du Label Rouge sont globalement entre 30 et 50 % (dans les cas extrêmes) plus chers que leurs équivalents en conventionnel. Reste enfin à savoir si la sortie des nouveaux cahiers des charges sur des produits transformés comme le hachis Parmentier et la lasagne bolognaise, vont améliorer la représentativité du Label Rouge en restauration, notamment en l’ancrant davantage dans le quotidien.

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La présence du signe dans les catalogues des grossistes de la restauration reste concentrée sur les viandes et volailles brutes. Ici, des pages tirées de catalogues de Krill et Davigel (Sysco) en 2020.

Entretien avec Frédéric Grosso, responsable du Pôle Label Rouge à l’INAO

Le Monde du Surgelé : Que pèse aujourd’hui le Label Rouge sur l’ensemble de la production alimentaire française et comment cette part évolue-t-elle ?

Frédéric Grosso (F.G.) : Le Label Rouge représente une petite fraction de la production alimentaire. En 2019, les produits labellisés pesaient 1,6 % de la production alimentaire totale française en volume pour 1,6 milliard d’euros. Cela étant dit, même s’il reste petit, il n’en reste pas moins dynamique avec une croissance de 2 % sur un an.

LMDS : Combien de produits (ou recettes) sont aujourd’hui couverts par le label sur le seul périmètre surgelé ?

F.G. : Il faut bien différencier les cahiers des charges de produits Label Rouge qui prévoient la surgélation, au nombre de 225, et les produits qui n’existent réellement qu’en version surgelée. Sur ce seul périmètre du surgelé, on a en gros cinq produits qui sont labellisés dont la pizza, les lasagnes ou la Saint Jacques. Même les crevettes peuvent être aussi bien réfrigérées que surgelées. L’essentiel de l’offre proposée en surgelés concerne des produits carnés piécés mais les produits élaborés sont très rares.

LMDS : Qu’est-ce que garantit le Label Rouge pour le consommateur ?

F.G. : Du côté du cahier des charges, il y a évidemment le produit final et sa qualité intrinsèque. Mais pour en arriver à ce résultat, il y a un ensemble de conditions de production. Ce n’est pas juste une promesse mais un ensemble de critères inscrits dans le cahier des charges qui définissent le produit de A à Z. Comme pour les autres signes de qualité, tous les points de maîtrise inscrits au cahier des charges sont contrôlés. Ce qui est très spécifique, en revanche, c’est le suivi de la qualité supérieure comme le prévoit la réglementation. Par rapport aux produits courants, le LR doit être meilleur et les fabricants doivent le prouver. Ce qui implique des tests sensoriels ou physico-chimiques réalisés par des laboratoires accrédités.

LMDS : Mais la plupart des cahiers des charges vont au-delà de la simple garantie organoleptique, n’est-ce pas ?

F.G. : Parfaitement ! Les consommateurs le savent peut-être moins mais le Label Rouge s’attache, dans le choix des matières premières ou des modes de production, à intégrer des critères qualitatifs comme le « sans OGM » ou le « sans huile de palme ». Nous considérons que la qualité se traduit aussi par ce biais-là. De plus, nous essayons aussi depuis longtemps d’introduire la dimension du bien-être animal et de l’impact environnemental. Cela n’a pas forcément d’impact sur le goût du produit mais s’intègre dans notre définition globale de la qualité.

LMDS : Et dans quelle mesure ont évolué les cahiers des charges depuis les origines du signe de qualité ?

F.G. : À l’origine, le Label Rouge a démarré avec les volailles et se concentrait sur un mode de production plus vertueux (plein air et en liberté) que l’élevage en batterie. Depuis, le signe de qualité n’a de cesse que de s’adapter aux modes de consommation. Les Français passent de moins en moins de temps à la préparation des repas et les foyers se font plus petits que par le passé… il fallait donc leur proposer davantage de produits élaborés, de découpes de viande, etc. Les cahiers des charges s’adaptent aussi à ça. Le résultat est déjà là avec un nombre de cahiers des charges pour des produits transformés en nette progression. Concernant la composition, on regarde de plus en plus les notions « sans OGM » par exemple pour les animaux d’élevage. On réduit au maximum les additifs, les quantités de sel, etc. pour être en phase avec les attentes des consommateurs. Enfin, et c’est un point crucial pour les opérateurs, nous faisons aussi en sorte de coller à la réalité technologique des produits. Par exemple, pour la viande hachée surgelée, le cahier des charges impliquait jusqu’alors de n’utiliser que de la viande fraîche. Or, les opérateurs souhaitaient pouvoir utiliser aussi de la viande congelée pour améliorer leur process. D’où le nouveau cahier des charges qui va permettre l’emploi de viande LR congelée, dans la limite de 30 %.

Propos recueillis par Jean-François Aubry

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